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Alerte opérationnelle : Financement d’activités terroristes

Numéro de référence : CANAFE-2022-OA001
Décembre 2022

Objectif

Cette alerte opérationnelle a pour but d’aider les entités déclarantes à reconnaître les opérations financières suspectées d’être liées au financement d’activités terroristes. Grâce aux déclarations d’opérations financières, CANAFE est en mesure de faciliter la détection, la prévention et la dissuasion de toutes les étapes du blanchiment d’argent (placement, dispersion et intégration) et de celles du financement des activités terroristes, en communiquant des renseignements financiers exploitables aux organismes d’application de la loi et de sécurité nationale. Cette alerte opérationnelle présente les indicateurs de financement des activités terroristes découlant de l’analyse des renseignements sur le financement d’activités terroristes communiqués par CANAFE.

Contexte

Le financement des activités terroristes consiste à réunir des fonds pour la réalisation d’activités terroristes. Les terroristes emploient des techniques semblables à celles utilisées pour le blanchiment d’argent (par exemple, le fractionnement ou l’utilisation de prête-noms) afin d’éviter d’attirer l’attention des autorités et de protéger l’identité des parties qui les appuient et, ultimement, celle des bénéficiaires des fonds. À l’instar de ceux destinés au blanchiment d’argent, les fonds affectés aux activités terroristes peuvent provenir de sources criminelles (par exemple, le commerce de la drogue, le trafic d’armes et d’autres biens, la fraude, les enlèvements et l’extorsion). Cependant, contrairement aux sommes allouées au blanchiment d’argent, ces fonds peuvent également provenir de sources légitimes (par exemple, les dons personnels et les profits générés par les entreprises et les organismes de bienfaisance), ce qui complique la détection et le suivi de ces fonds. Les fonds servant à financer les activités terroristes ont également tendance à représenter des montants moindres que ceux étant destinés au blanchiment d’argent.

Le gouvernement du Canada regroupe les menaces terroristes avec lesquelles le Canada compose en trois grands types d’extrémisme violent : l’extrémisme violent à caractère religieux (EVCR), l’extrémisme violent à caractère politique (EVCP) et l’extrémisme violent à caractère idéologique (EVCI).

À ce jour, 77 entités terroristes sont inscrites en vertu du Code criminel. Cette liste peut être consultée sur le site Web de Sécurité publique Canada. L’établissement de ces listes d’entités terroristes contribue à éviter que le système financier canadien ne favorise l’activité terroriste en fournissant les moyens de saisir, d’immobiliser ou d’obtenir la confiscation des biens appartenant à une entité inscrite. Parmi les plus récentes entités terroristes inscrites depuis 2019, on trouve des groupes adeptes de l’EVCI (c’est la première fois que de tels groupes sont inscrits sur la liste au Canada).

Le gouvernement du Canada déclare que les actes liés à l’EVCR, l’EVCP et l’EVCI représentent tous une menace pour la sécurité du Canada, sans compter que la présence de gestes relevant de l’EVCI s’est intensifiée au Canada ces dernières années. Depuis 2014, le gouvernement du Canada constate que les personnes canadiennes motivées entièrement ou en partie par des opinions relevant de l’EVCI ont tué et blessé davantage de gens en sol canadien que celles dont les actes s’inspirent de l’EVCR ou de l’EVCP.

Le gouvernement du Canada explique les types d’extrémisme violent :

  • L’EVCR incite au recours à la violence dans le cadre d’une lutte spirituelle contre un système perçu comme immoral. Les adeptes croient que la violence est le seul moyen d’atteindre le salut.
  • L’EVCP incite au recours à la violence pour instaurer de nouveaux régimes politiques ou pour modifier les structures et les normes des régimes existants.
  • L’EVCI est souvent mu par une série de récriminations et d’idées qui couvrent le spectre idéologique traditionnel. La vision du monde qui en découle s’articule autour d’un discours personnalisé, axé sur la volonté de l’extrémiste de mobiliser les personnes, de les inciter à perpétrer des actes de violence et de leur donner les moyens de passer à l’action. Les adeptes de l’extrémisme sont influencés par une multitude de sources, dont des livres, des images, des exposés, des pièces musicales, des discussions en ligne, des vidéos et des conversations. Ces personnes et ces cellules agissent souvent sans démontrer de manière évidente une appartenance à un groupe organisé précis ou l’action d’une influence externe. Elles sont néanmoins façonnées par des voix et des messages haineux en ligne qui normalisent et préconisent le recours à la violence.

Source : Rapport public du SCRS 2020

Aperçu des résultats de l’analyse des communications de CANAFE relatives au financement d’activités terroristes

CANAFE a analysé un échantillon de communications datées de janvier 2019 à octobre 2022 liées au financement d’activités terroristes. Selon l’analyse de CANAFE, les opérations communiquées s’inscrivaient dans trois grands thèmes : le terrorisme national, le financement de groupes terroristes internationaux et les voyageurs extrémistes canadiens (VEC). Les trois types d’extrémisme violent, tels que les a définis le gouvernement du Canada, ont été constatés dans les communications de l’échantillon de CANAFE, les actes liés à l’EVCI et l’EVCR étant les plus fréquents.

CANAFE a analysé ses communications des deux dernières années sur les menaces terroristes survenues au Canada en particulier. Autrement dit, la cible des actes terroristes se trouvait au Canada (peu importe si un attentat terroriste s’est réellement produit). Cette situation correspond à ce que Sécurité publique Canada qualifie de menaces et d’incidents liés au terrorisme national dans le Plan fédéral d’intervention en cas d’acte terroriste. La plupart de ces communications de CANAFE traitaient d’EVCI. D’après l’analyse du Centre, les auteurs d’actes d’EVCI au Canada étaient groupés en trois sous-catégories : les personnes agissant seules, les réseaux transfrontaliers et les groupes organisés. Les personnes agissant seules ont tendance à financer leurs propres attaques, souvent par les payes, les dépôts de montant provenant de l’aide gouvernementale ou les dépôts en espèces. Les réseaux transfrontaliers utilisaient principalement de grandes entreprises de services monétaires (ESM) pour transférer des fonds, ainsi que les télévirements. Ils ont été principalement envoyés à des tiers, souvent dans des endroits où les activités liées à l’EVCI sont des sources de préoccupationNote de bas de page 1. Les groupes organisés ont collecté des fonds par le biais d’une gamme de méthodes, notamment les télévirements, la vente de marchandises et les dépôts en espèces fréquents. La section de référence des télévirements comportait souvent des mots, des phrases ou des chiffres particuliers (par exemple, les années ayant une signification spéciale dans l’idéologie des adeptes, ou des chiffres correspondant au nom du groupe) qui reliaient l’opération à un groupe d’EVCI précis. Les résultats de l’analyse de CANAFE ont révélé que des auteurs situés au Canada et y opérant étaient mêlés à l’activité de financement des actes d’EVCI. Des fonds ont été envoyés à l’étranger à des auteurs présumés d’actes d’EVCI, mais l’analyse des opérations financières ciblées a permis de démontrer que certaines opérations ou activités liées à l’EVCI ont aussi été organisées au Canada.

CANAFE a constaté que les opérations effectuées par les groupes terroristes internationaux en matière de financement consistaient principalement en des transferts de fonds vers un autre pays (surtout vers des pays ou territoires où le financement d’activités terroristes était source de préoccupation)Note de bas de page 2. Les pays ou territoires sources de préoccupation les plus fréquemment mentionnés dans les communications de CANAFE sont les suivants : l’Irak, le Liban, le Pakistan, la Syrie, la Turquie, les Émirats arabes unis et le Yémen. Ces transferts de fonds internationaux vers d’autres pays, souvent financés par le biais de dépôts en espèces, étaient exécutés par des personnes au Canada et ils supposaient principalement l’utilisation d’ESM.

Dans les communications analysées, l’entité terroriste internationale la plus fréquemment indiquée était Daech, suivi du Hezbollah. Une grande partie des fonds soupçonnés de soutenir Daech ont été envoyés en Turquie, souvent dans les régions ou les villes proches de la frontière turco-syrienne, une zone particulièrement à haut risque en ce qui a trait au financement d’activités terroristes.

La majorité des fonds suspectés de servir au financement du Hezbollah ont été envoyés au Liban. Les fonds soupçonnés d’être utilisés pour financer ce groupe étaient fréquemment envoyés ou reçus par des personnes ou des entités mentionnant la vente de voitures ou répertoriés dans l’industrie automobile.

CANAFE continue de recevoir les déclarations d’opérations financières douteuses liées à la menace que représentent les VEC. Les cinq étapes du processus suivi par les voyageurs qui est présenté dans l’Évaluation des risques de financement des activités terroristes 2018 de CANAFE restent pertinentes et ont été constatées dans les opérations financières analysées. Voici les cinq étapes : préparation au départ; déplacement; activités sur place; retour; et voyage interrompu. CANAFE a observé que les VEC se préparant en prévision du départ épuisaient souvent leur compte avant d’entreprendre leur voyage au moyen de retraits d’espèces. Un changement important par rapport à l’historique des mouvements sur les comptes des VEC était également observé avant le départ de ceux-ci du Canada. L’activité financière qu’affichaient les personnes à l’étape du déplacement comportait l’utilisation de cartes de débit ou de crédit s’inscrivant dans une zone de déplacement connue d’accès à une zone de conflit ou à un lieu qui s’avérait une source de préoccupations. Souvent, les comptes étaient inactifs pendant que le VEC menait ses activités sur place. Leur utilisation reprenait ensuite à son retour au Canada. De plus, les VEC rentrant au Canada envoyaient ou recevaient fréquemment des virements de l’étranger, sans compter qu’ils recevaient des dépôts en espèces de la part de tiers sans but évident. Le déplacement de VEC potentiels était parfois interrompu avant que ceux-ci ne puissent quitter le Canada. Selon les renseignements accessibles au public, cette situation découlait de l’intervention des forces de l’ordre. Dans les communications de CANAFE faisant partie de l’échantillon, on a constaté que les remboursements liés aux voyages, comme les billets d’avion, étaient souvent versés dans les comptes de ces voyageurs dont le déplacement avait été interrompu.

Motifs raisonnables de soupçonner et utilisation des indicateurs

La façon dont les entités déclarantes décident si elles doivent déclarer des opérations douteuses à CANAFE (qu’elles soient réalisées ou tentées) nécessite plus qu’une « intuition » ou qu’un « pressentiment », bien que la preuve du financement d’activités terroristes ne soit pas exigée. Les entités déclarantes doivent tenir compte des faits, du contexte et des indicateurs de financement des activités terroristes entourant une opération. En considérant ces éléments ensemble, il est possible de créer une image essentielle à la distinction d’une opération douteuse d’une opération raisonnable dans le cadre d’un scénario donné. Les entités déclarantes doivent avoir des motifs raisonnables de soupçonner qu’une opération, réelle ou tentée, est liée au financement d’activités terroristes avant de pouvoir soumettre une déclaration d’opération douteuse à CANAFE.

Les indicateurs de financement des activités terroristes peuvent être considérés comme des signaux d’alarme indiquant que quelque chose semble très louche. Les signaux d’alerte tirent généralement leur origine d’une ou plusieurs caractéristiques, ou d’un ou plusieurs comportements, schémas et autres facteurs contextuels relatifs aux opérations financières qui les font paraître incohérentes par rapport aux attentes ou à la normalité. En soi, un indicateur peut ne pas sembler suspect au départ. Il pourrait toutefois amener les entités déclarantes à mettre en doute la légitimité d’une opération, les incitant ainsi à l’évaluer pour établir si d’autres faits, éléments contextuels ou indicateurs de blanchiment d’argent ou de financement d’activités terroristes qui renforceraient leurs soupçons au point de devoir soumettre une déclaration d’opération douteuse (DOD) à CANAFE (voir les directives de CANAFE sur les déclarations d’opérations douteuses).

Déclaration de biens appartenant à un groupe terroriste à CANAFE

Les entités déclarantes doivent transmettre une déclaration de biens appartenant à un groupe terroriste (DBGT) à CANAFE conformément à la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes et les règlements connexes lorsqu’elles sont tenues de faire une déclaration selon l’article 83.1 du Code criminel ou l’article 8 du Règlement d’application des résolutions des Nations Unies sur la lutte contre le terrorisme. Une communication de renseignements doit être faite dans les situations suivantes : a) lorsqu’une entité déclarante sait qu’un bien en sa possession ou à sa disposition appartient à un terroriste ou à un groupe terroriste, ou est à sa disposition, directement ou non; b) lorsqu’une entité déclarante détient de l’information sur une opération, réelle ou projetée, visant un bien appartenant à un terroriste ou à un groupe terroriste, ou étant à sa disposition, directement ou non.

Pour une communication de renseignements telle que décrite précédemment, un bien est tout ce qui est possédé par une personne ou une entité ou tout ce qui est à sa disposition, qu’il soit matériel ou immatériel. Cela comprend les biens immobiliers et personnels, ainsi que tout acte ou instrument accordant un titre ou un droit à un bien ou donnant droit de recevoir de l’argent ou des marchandises. Cela comprend également tout bien qui a été converti ou échangé, ou acquis à la suite d’une conversion ou d’un échange. Voici des exemples de biens : les espèces, les instruments monétaires, les produits et jetons de casino, la monnaie virtuelle, les comptes bancaires, les produits de paiement prépayés et les comptes de produits de paiement prépayés, les valeurs mobilières, les bijoux, les métaux précieux ou les pierres précieuses, les biens immobiliers et les polices d’assurance. Ainsi, lorsqu’un tel bien appartient à un terroriste ou à un groupe terroriste, ou est à sa disposition, directement ou non, et qu’il est en la possession ou à la disposition d’une entité déclarante, ou si une entité déclarante détient de l’information sur une opération, réelle ou projetée, visant un tel bien, l’entité déclarante doit transmettre une communication de renseignements à la GRC ou au SCRS et une DBGT à CANAFE.

Les DBGT diffèrent des autres déclarations qui sont soumises à CANAFE parce qu’il n’est pas nécessaire qu’une opération ou une tentative d’opération ait lieu pour que les entités déclarantes soumettent une DBGT. C’est plutôt la simple existence de biens appartenant à un groupe terroriste ou à une personne inscrite, ou à leur disposition, directement ou non, qui oblige les entités déclarantes à en informer la GRC ou le SCRS et à soumettre une DBGT à CANAFE. Si l’on a effectué ou tenté d’effectuer une opération visant un bien que l’entité déclarante sait appartenir à un terroriste ou à un groupe terroriste, ou être à sa disposition, directement ou non, alors l’entité déclarante doit aussi transmettre une DOD à CANAFE. Par ailleurs, si une entité déclarante ne sait pas avec certitude, mais suspecte qu’un bien en sa possession ou à sa disposition appartient à un terroriste ou à un groupe terroriste, ou est à sa disposition, directement ou non, elle doit transmettre une DOD à CANAFE si l’on a effectué ou tenté d’effectuer une opération associée au bien en question.

Les entités déclarantes doivent soumettre une DBGT à CANAFE immédiatement lorsqu’elles doivent faire une communication en vertu du Code criminel ou du Règlement d’application des résolutions des Nations Unies sur la lutte contre le terrorisme. Pour de plus amples renseignements sur la façon de soumettre une DBGT, veuillez consulter les Directives sur la déclaration de biens appartenant à un groupe terroriste à CANAFE.

Indicateurs de financement d’activités terroristes

Vous trouverez ci-dessous des indicateurs de financement d’activités terroristes tirés de l’analyse de CANAFE. Ils représentent les types d’opérations et leurs tendances, ainsi que les facteurs contextuels, d’où l’importance de connaître son client. Les indicateurs de la page Indicateurs de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme – Entités financières et de l’Évaluation des risques de financement d’activités terroristes 2018 de CANAFE sont inclus ci-dessous, car ils demeurent pertinents et doivent être examinés tous ensemble.

Ces indicateurs ne devraient pas être traités séparément, car pris isolément, ils ne constituent pas nécessairement un signe de financement du terrorisme ou d’une autre activité douteuse. Les entités déclarantes devraient donc les évaluer en combinaison avec les renseignements dont elles disposent sur le client et avec d’autres facteurs se rapportant aux opérations avant d’établir des motifs raisonnables de soupçonner qu’une opération ou une tentative d’opération est liée à la perpétration ou à la tentative de perpétration d’une infraction de financement du terrorisme. La prise en compte de plusieurs indicateurs s’avère parfois la seule façon de mettre au jour des liens, qui mis ensemble, peuvent mener à des motifs raisonnables de soupçonner qu’une opération ou une tentative d’opération est liée au financement d’activités associées à la perpétration ou à la tentative de perpétration d’une infraction de financement du terrorisme. C’est donc le regroupement de différents facteurs qui peut corroborer la détermination de soupçons. Les indicateurs suivants ont été établis pour aider les entités déclarantes dans leur analyse et leur évaluation des transactions financières douteuses.

Indicateurs de financement d’activités terroristes liées au terrorisme national

Les indicateurs suivants sont applicables à différents types d’extrémisme violent (p. ex., EVCI, EVCR et EVCP). Certaines caractéristiques propres à l’EVCI sont conformes à celles mentionnées dans le Bulletin spécial de CANAFE sur le mode de financement des activités terroristes des adeptes de l’extrémisme violent à caractère idéologique.

Indicateurs de financement d’activités terroristes liées au soutien de groupes terroristes internationaux

Certains des indicateurs suivants sont également inclus dans les Directives de CANAFE sur les indicateurs de blanchiment d’argent et de financement des activités terroristes – entités financières. Ces indicateurs sont encore observés fréquemment par CANAFE dans les opérations douteuses de financement d’activités terroristes.

Indicateurs de financement d’activités terroristes liées aux voyageurs extrémistes canadiens

Certains des indicateurs suivants sont également inclus dans l’Évaluation des risques de financement d’activités terroristes 2018 de CANAFE. Ces indicateurs sont encore observés fréquemment par CANAFE dans les opérations douteuses de financement d’activités terroristes.

Préparation au départ

Déplacement

Activités sur place

Retour

Voyage interrompu

Communiquer avec CANAFE

© Sa Majesté le Roi du chef du Canada, 2022.
No de cat. FD4-27/2022F-PDF
ISBN 978-0-660-41874-2

Ressources

Pour en savoir plus sur le financement des activités terroristes, l'extrémisme violent ainsi que les renseignements financiers associés, veuillez consulter les ressources suivantes :

Canada

International

Date de modification :